Le soir: Dossier Rwanda…
Laurent Nubaha est décédé ce week-end. Il devait venir témoigner devant la cour d’assises le 30 mai. Mort suspecte ? Une instruction a été ouverte pour le vérifier. En attendant, M e Luc De Temmerman, assurant la défense de l’accusé Bernard Ntuyahaga, a demandé à la cour d’assises de Bruxelles de suspendre les débats, lundi, en signe de deuil pour sa mort… alors que l’on parle tous les jours, à ce procès, de milliers de morts.
Autre demande atypique : que la cour, les jurés, les avocats, l’accusé… se rendent au Rwanda pour mieux visualiser la disposition des lieux où ont été désarmés puis tués les dix casques bleus belges. Cette demande, qui ne vient d’ailleurs pas des avocats des familles des casques bleus, a trouvé un écho assez favorable parmi les jurés. Mais elle soulève aussi de lourdes questions de procédure : comment se rendre avec un accusé détenu dans un autre pays où son maintien en détention préventive n’a aucune valeur ? La hiérarchie mise en cause
Au coeur des débats de fond, sur les responsabilités de l’ex-major Ntuyahaga de l’armée rwandaise dans la mort des casques bleus, plusieurs militaires belges sont venus apporter, chacun, leur petite pièce à l’édifice de la reconstruction des faits. Les questions se sont centrées sur les 6 et 7 avril 1994. Dans la nuit, le peloton Mortier, du lieutenant Lotin, est envoyé chez la Première ministre. La situation est tendue, les quatre jeeps progressent lentement, puis essuient des tirs. Un moment, on propose aux casques bleus de déposer les armes en échange d’une protection. Nous voilà au coeur du procès.
La présidente de la cour d’assises, Karin Gérard, pose la question au capitaine Patrick Collin, officier de liaison affecté aux communications radio : « avez-vous entendu qui proposait la prise en charge des casques bleus ? » « Oui, un major de l’armée rwandaise, » confirme Collin. Tout comme le fera ultérieurement un autre « radio », le commandant Yves Theunissen. Qui précisera même l’heure. « Le major des Forces armées rwandaises propose à Lotin de rendre les armes. Suite à son hésitation, le major se fâche. Il était 8h31. »
A cette heure-là, l’accusé affirme qu’il était toujours chez lui, attendant qu’un véhicule vienne le chercher pour aller au travail. Des militaires ont aussi critiqué la hiérarchie militaire pour sa mauvaise interprétation de la situation. Un extrait d’une conversation radio du 7 avril 1994 en atteste. Une section belge est en difficulté. « Les gendarmes sont menaçants, » lance le lieutenant Vermeulen. « Vis-à-vis de la foule ? » demande le colonel Marchal. « Non, vis-à-vis de nous, » ponctue le militaire. JEAN-PIERRE BORLOO
22 mai 2007
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