
(Leader Africa 02/08/2007)
Le président français Nicolas Sarkozy a reconnu jeudi 26 juillet, dans un discours à Dakar, au Sénégal, que la colonisation avait été une « grande faute », tout en estimant que l’Afrique avait « sa part de responsabilité dans son propre malheur”.
« Je ne suis pas venu nier les fautes ni les crimes, car il y a eu des fautes et il y a eu des crimes », a déclaré le chef de l’Etat à l’université Cheikh-Anta- Diop, dans la capitale sénégalaise.
La traite négrière et l’esclavage ne furent « pas seulement un crime contre les Africains, ce fut un crime contre l’homme, un crime contre l’humanité toute entière », a-t-il souligné.
« Le colonisateur est venu, il a pris, il s’est servi, il a exploité, il a pillé des ressources, des richesses qui ne lui appartenaient pas. Il a dépouillé le colonisé de sa personnalité, de sa liberté, de sa terre, du fruit de son travail. »
Mais « la colonisation n’est pas responsable de toutes les difficultés actuelles de l’Afrique, a estimé Nicolas Sarkozy. Elle n’est pas responsable des guerres sanglantes que se font les Africains entre eux », ni des « génocides », des « dictateurs », du « fanatisme », « de la corruption et de la prévarication (…), des gaspillages, de la pollution. »
Le président Sarkozy est peut-être parmi les rares chefs d’Etat occidentaux à avoir pris son courage entre les mains pour dire tout haut ce que d’autres disent tout bas a propos du malheur actuel de l’Afrique.
Le président a, sans froid aux yeux, mis les africains devant leur responsabilité dans les difficultés qui accablent de nos jours le continent africain.
Il est clair comme l’eau de la source que l’Afrique a sa part de responsabilité dans son malheur actuel. Nous devons tous le reconnaître afin qu’ensemble nous puissions nous atteler a apporter des solutions adéquates, efficaces et durables.
Certes oui, il va de soi que si l’Afrique veut mettre fin à son long chemin de calvaire, elle n’a pas d’autre choix que se débarrasser de ce carcan que le président français Sarkozy a labelle :
« Dictateurs », « fanatisme », « corruption et prévarication (…), des gaspillages….
Point n’est besoin de rappeler qu’ils constituent un frein a son développement et a son émancipation.
Mais, nous devons par ailleurs aussi faire preuve du réalisme. Dans la quête des solutions au problème du développement de l‘Afrique, nous devons éviter d’être trop simpliste. Il est impérieux de reconnaître que la problématique du développement ou l’émancipation de l’Afrique est un problème bien complexe qui exige une conjugaison d’efforts et une volonté politique claire de la part de tous les acteurs.
En effet, s’il est vrai que « la colonisation n’est pas responsable de toutes les difficultés actuelles de l’Afrique, comme l’a revendiqué Nicolas Sarkozy. Il sied de reconnaître qu’il est tout aussi vrai que l’Afrique n’est pas non plus responsable des toutes ses difficultés actuelles.
Il existe donc des causes endogènes et exogènes qui expliquent le malheur actuel de l’Afrique. La solution à cette équation de l’émancipation ou du développement de l’Afrique passe nécessairement par la prise en compte de tous les paramètres. Il est ici important de noter que l’on ne peut pas aborder l’un sans faire allusion à l’autre.
Parler des responsabilités des africains dans le malheur actuel de l’Afrique est tout à fait une bonne chose. Mais, parler des causes endogènes sans faire référence aux causes exogènes me parait une démarche on ne peut plus folklorique et fragmentaire.
En effet, nous ne devons point perdre de vue que l’occident a sa part de responsabilité dans le malheur actuel de l’Afrique. Il serait une erreur monumentale que de passer outre ou sous estimer le rôle de l’occident dans les déboires actuels de l’Afrique.
Comme hier, nous constatons malheureusement que l’occident est co-architecte ou responsable des guerres sanglantes que se font les Africains entre eux, des pillages et « génocides » qui ont élu domicile dans certains coins de l’Afrique. La république démocratique du Congo en est la preuve la plus éloquente. Le Congo est même un cas d’école.
“La colonisation du Congo fut la plus infâme ruée sur un butin ayant jamais défiguré l’histoire de la conscience humaine ».
Joseph Conrad
« L’exploitation du Congo fut le plus grand crime contre l’humanité jamais commis dans l’histoire de l’humanité »
Sir Arthur Conan Doyle, Letters to the press, 1909.
Cinq à huit millions de morts, peut-être même dix : tel est le bilan accablant de la conquête et de l’exploitation coloniale du Congo belge, entre les années 1880 et la première guerre mondiale. C’est à ce chiffre que conclut le journaliste américain Adam Hochschild au terme de son effarante enquête sur cet « holocauste oublié ».
Un adage dit : « Jamais un sans deux ». Hitler n’a-t-il pas annoncé son plan de génocide contre les juifs et les slaves en disant : « Qui se souvient aujourd’hui des Arméniens ?»
Au cours de cette dernière décennie, le Congo a été le théâtre des violents affrontements qui sont à la base de la plus grave crise que l’humanité n’ait jamais connue depuis la fin de la seconde guerre Mondiale.
Le bilan de cette invasion parle de lui-même:
· 5 000 000 de morts depuis 1998 (IRC)
· Plus de 38 000 morts par mois / 1200 morts par jour
· Des centaines de milliers de femmes et enfants violées (HWR)
· 585 000 enfants meurent chaque année des conséquences de la guerre
· 1,4 a 1,6 millions de déplaces du au conflit (NU OCHA)
Mais, qui donc a été à la base cette guerre sanglante au Congo ; laquelle guerre a cause cette plus grave crise que l’humanité n’ait jamais connue depuis la fin de la seconde guerre mondiale.
La réponse à cette question est donnée par la journaliste Marie-France Cros dans un livre publié avec François Misser. Cette réponse se passe de tout commentaire. Reproduisons- la :
« Enfin, alors que toute l’Afrique est secouée par la vaque des conférences nationales, Mobutu n’apparaît plus comme le partenaire incontournable pour gérer cette partie du continent. Peu à peu, les esprits se sont préparés à l’avènement d’une relève et même à un éclatement du pays.
Des scénarios de partition sont évoqués au Pentagone où l’on semble se résigner à leur inéluctabilité. (Elle ajoute une note : « Dans un célèbre rapport intitulé Reform, Conflict and Security in Zaïre, publiait en juin 1996, le professeur Steven Metz, de l’US Army War College, préconisait qu’au cas où une telle « désintégration » du pays se produirait, « les Etats-Unis n’auraient pratiquement pas d’autre choix que d’accepter tous les Etats nouveaux qui émergeraient du Zaïre » »)
En définitive, l’initiative est venue en septembre 1996 des acteurs régionaux (Ouganda, Rwanda et Tanzanie d’abord) dont certains, naguère, avaient hébergé des opposants congolais menant quelques petites opérations de déstabilisation aux marges du Zaïre. » (M.-F. Cros et F. MISSER, Géopolitique du Congo (RDC), Bruxelles, Complexe, 2006, p.111).
Au vu et au su de l’ONU, le Congo est devenu ce que l’on appelle en droit civil « Terra Nullius », c’est-à-dire un territoire qui n’appartient a personne.
Lorsque le peuple congolais espérait reprendre souffle après la guerre, dite de «libération», une nouvelle guerre éclatait, qu’on a appelé «d’occupation». Il a fallu beaucoup de temps pour que l’ONU parle de violation, de la part de l’Ouganda et du Rwanda (l’implication du Burundi est presque toujours oubliée), de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de la RDC. Avec l’ONU, la généralité des États n’a pas osé donner à cette guerre son véritable nom: guerre d’agression.
Les ambitions économiques du Rwanda ne se limitent pas à la prédation de richesses facilement accessibles et commercialisables, comme l’or et le diamant. Le sous-sol du Kivu recèle des minerais utilisés dans l’industrie de pointe (électronique, aéronautique, médecine nucléaire), comme le niobium (15 % des réserves mondiales se trouvent en Afrique, dont 80 % au Congo), le tantale, associé au colombium, appelé coltan dans la région (l’Afrique recèle 80 % des réserves mondiales de tantale, dont 80 % au Congo).
Ces minerais rares ont pour caractéristique une exceptionnelle résistance au froid et à la chaleur et peuvent être utilisés dans des alliages très ductiles et très résistants. D’après de nombreux témoignages en provenance du Kivu, l’exploitation et la commercialisation de ces minerais sont le monopole des Rwandais, protégés par les militaires, et plusieurs compagnies internationales, dont Kenrow International of Gaithersburg, originaire du Maryland, sont représentées à Kigali.
Selon le Daily Mail de Tanzanie (14 janvier 1999) le vice-président Kagame et le commandant James Kabare – qui fut chef d’état-major par intérim auprès du président Kabila avant de se retourner contre lui – détiendraient des intérêts dans plusieurs compagnies minières (Littlerock Mining Ltd, Tenfields Holdings Limited, Collier Ventures Ltd, Sapora Mining Ltd) et une compagnie d’import-export, Intermarket.
Depuis l’éclatement de la première guerre du Congo, qui mena au renversement du maréchal Mobutu, plusieurs sociétés minières ont été citées, pour avoir financé des opérations militaires en échange de contrats avantageux dans l’est de la RDC : l’américaine Barrick Gold Corporation (dont l’un des actionnaires est l’ancien président George Bush), l’australienne Russel Ressources dirigée par l’ancien général israélien David Agmon, l’autrichienne Krall, la canadienne Banro American Ressources.
A ce sujet, Jean-Claude Willame note : « Que ce soit en Ituri, au Kivu ou au Nord-Katanga, il était difficile d’occulter le constat d’une « économie de guerre » alimentée par une demande extérieure de ressources primaires si abondantes au Congo, une économie sur laquelle la communauté internationale voulut parfois fermer pudiquement les yeux. » (J.-C. WILLAME, Les faiseurs de paix au Congo. Gestion d’une crise internationale dans un Etat sous tutelle, Bruxelles,Crip, p.108)
Et qui en profitait ? « Sur 85 entreprises listées comme ayant enfreint les dispositions du code de conduite des entreprises multinationales édicté par l’OCDE, se trouvent quatre grandes banques (dont trois belges), dix-sept « juniors miniers » américains, canadiens, belges ou britanniques, un important groupe miner belge, onze entreprises diamantaires belges, ainsi que plusieurs dizaines de sociétés peu connues établies en Afrique, au Moyen-Orient et en Asie. » (Ibidem)
Loin de moi l’idée de dédouaner les complices congolais (qui rendront tôt ou tard compte devant le peuple congolais des crimes et trahison dont ils se sont rendus coupables), il apparaît très clairement que l’occident est bel et bien responsable de cette guerre sanglante « guerre d’agression), ce pillage et cette tragédie humaine que les congolais appellent « Génocide Oublié ».
La colonisation est bien présente en Afrique. Elle a tout simplement changé des méthodes. Elle est devenue beaucoup plus subtile et sournoise. Au Congo, elle utilise des forces dites « cooperative forces » dont le Rwanda, le Burundi et l’Ouganda pour atteindre son objectif.
Les congolais sont unanimes à reconnaître que cette guerre leur a été imposée pour satisfaire les désirs gloutons et prédateurs des occidentaux qui n’ont pas encore mis terme à leur entreprise colonisatrice qui rapporte gros.
L’histoire du Congo est un exemple palpant qui démontre a suffisance la responsabilité de l’occident dans le malheur actuel de l’Afrique.
Certes oui, « Le colonisateur est venu, il a pris, il s’est servi, il a exploité, il a pillé des ressources, des richesses qui ne lui appartenaient pas. Il a dépouillé le colonisé de sa personnalité, de sa liberté, de sa terre, du fruit de son travail. »
Mais, il serait faux et même naïf de croire que le colonisateur est parti. Il est toujours la. Il continue à prendre, il continue à se servir, il continue à exploiter, il continue à piller des ressources, des richesses qui ne lui appartiennent pas. Il continue à dépouiller le congolais (l’africain) de sa personnalité, de sa liberté, de sa terre, du fruit de son travail.
Vous avez dit, je m’en souviens : «Je veux lancer un appel à tous les Africains, un appel fraternel pour dire à l’Afrique que nous voulons l’aider; aider l’Afrique à vaincre la maladie, à vaincre la famine, à vaincre la pauvreté, à vivre en paix. Je veux leur dire que nous allons décider ensemble d’une politique d’immigration maîtrisée et d’une politique de développement».
Nous pensons que la meilleure façon d’aider l’Afrique à vaincre la maladie, à vaincre la famine, à vaincre la pauvreté, à vivre en paix consiste à renoncer aux actions terroristes et de destabilisation des jeunes nations africaines.
CONSCIENCE CONGOLAISE – KE’ LAMPAM











2 août 2007
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