L’opération Kimya II visant à contraindre au retour en patrie les FDLR-Hutu rwandais se trouvant dans la province du Sud-Kivu, a commencé à quelques endroits. La population de Burhinyi, qui souffre plus qu’auparavant, observe, écoute et se pose beaucoup de questions.
A partir de Kilungutwe, dans tous les coins se trouvant sur la route pour Mwenga, l’opération Kimya II a commencé. Tout en connaissant tous les endroits où les Hutu-FDLR sont installés, l’armée nationale congolaise, les FARDC, est restée près de la route, en repoussant les FDLR dans les quartiers habités par la population locale, qui donc souffre.
C’est dans le Groupement de Nirindja que se trouve la plus grande partie de ces Hutu avec leurs familles. Les combattants sont au milieu des gens et protègent les lieux où se trouvent leurs familles. Quelques-uns d’eux sont habillés en civil, d’autres portent les tenues des FARDC. « C’est pour semer la confusion dans la population », disent-ils. En effet, étant donné que certains Hutu ressemblent à des Congolais, la population craint de s’exprimer et de porter plainte, ne sachant pas devant qui elle se trouve. Elle se demande où ces combattants ont trouvé les tenues militaires.
Certains de ces Hutu nous ont dit :
« Nous regrettons que vous alliez nous poursuivre en forêt, là où il n’y a que nos familles pauvres, alors que ceux parmi nous qui ont des possibilités résident à Bukavu et dans d’autres centres du Nord et Sud-Kivu, en vous côtoyant chaque jour.
En dénonçant les lieux où nous sommes, vous êtes des ‘bicucu’1, car, si les FARDC nous attaquent, c’est vous qui en serez les victimes. En effet, partout où nous sommes, vous y êtes. Quand on voudra nous tuer, on vous tuera aussi. D’ailleurs, nous connaissons la forêt plus que vous et nous y trouverons refuge. Nous connaissons aussi mieux que vous le territoire, alors que vous ne savez même pas les noms des chefs de quartier2. Cette opération Kimya II est contre vous. Nous sommes avec vous et derrière vous, et c’est vous, la population congolaise, qui serez notre porte.
L’objectif déclaré de l’opération « « Kimya II » est celui de nous faire regagner, par la force si nécessaire, notre pays. En réalité, les FARDC ne nous attaquent pas, nous repoussent encore plus dans la forêt ou dans la brousse, là où nous ne sommes pas encore arrivés. Ils commencent à tirer lorsqu’ils sont encore loin, pour nous permettre de fuir et éviter des victimes dans la population. S’ils sont contre nous, pourquoi ne nous prennent-ils pas en otage, pour nous contraindre à rentrer ? Les militaires FARDC sont nos frères3 et ne peuvent pas nous tuer. En outre, ils savent de ne pas avoir la force de nous prendre en otage ».
La population pense que cette opération est une distraction4 et trouve que repousser les FDLR vers l’intérieur c’est autre chose que leur faire regagner leur village natal au Rwanda5. Elle pense aussi que le régime rwandais ne souhaite pas que les Hutu-FDLR rentrent au pays, car tant qu’ils sont éloignés, il peut continuer à asseoir son pouvoir. Elle se demande donc : quel est le vrai objectif de cette opération ?
Fait à Burhinyi, le 22 juin 2009.
La voix de la population
1 Insulte. Le bicucu est la partie terminale de la canne à sucre, qui n’a plus de saveur ni de valeur.
2 En effet, certains d’entre eux ont des téléphones de grand prix, avec internet, caméra, etc., sur lesquels ils enregistrent beaucoup d’informations. Ils sont vite renseignés sur tout ce qui se dit dans des réunions des FARDC. Chaque côté d’ailleurs a ses espions.
3 Beaucoup de FDLR, présents sur le territoire depuis 1994, se sont mariés avec des filles congolaises.
4 La population se demande en effet où on a encore vu une armée voyageant avec les familles, des matelas, des grosses radios, des cartons de piles…, en plus mal payée.
5 Depuis le début de l’opération, aussi bien au Nord qu’au Sud-Kivu, bien peu sont les combattants contraints à rentrer au Rwanda.











27 juin 2009
Au fil des jours