REVUE DE PRESSE

8 septembre 2012

Aujourd'hui dans la presse

Congoforum

Le sujet dominant l’actualité des quelques journaux parus à Kinshasa ce samedi se trouve être le sommet de Kampala où l’on apprend que des divergences de vues persistent et surtout que Kagame a décidé de sécher ces assises.

Kampala

D’après le périodique 7/7 paraissant en Belgique : « La ministre des Affaires étrangères du Rwanda Louise Mushikiwabo a accusé jeudi la République démocratique du Congo (RDC) de « mauvaise foi » après que Kinshasa eut une nouvelle fois accusé Kigali de soutenir une rébellion armée dans l’Est congolais. « Les accusations de Kinshasa, on vit avec depuis 4 mois et encore une fois, c’est une preuve de la mauvaise foi de nos voisins », a déclaré Mme Mushikiwabo sur France 24.
« Les autorités congolaises sont dans cette psychose de toujours trouver le voisin coupable (…) Quand il y a un problème au Congo, si ce n’est pas le Rwanda, c’est le Congo Brazzaville, c’est l’Angola, c’est l’Ouganda », a-t-elle ironisé.

Le Potentiel titre à la Une « Force internationale neutre : impasse à Kampala »
Selon lui, les violons sont loin de s’accorder entre Kigali et Kinshasa alors que s’ouvre à Kampala en Ouganda la réunion extraordinaire de la Conférence internationale pour la région des Grands Lacs (CIRGL). Kinshasa persiste sur sa position de reconfigurer les troupes de la Mission des Nations unies pour la stabilisation du Congo (Monusco) afin d’en faire une force internationale neutre à déployer dans sa partie Est. Ce que refuse le Rwanda qui soutient plutôt l’idée d’actionner le mécanisme conjoint de vérification, comme prévu dans le Pacte sur la paix, la sécurité, la stabilité et le développement dans la région des Grands Lacs, en vigueur depuis 2008. On va droit vers une impasse, conclut ce journal.

La Référence + note pour sa part « Sommet de Kampala : Paul Kagame refuse de participer ».
Ouverture retardée de quelques jours dudit sommet parce que les chefs des Grands Lacs attendent les conclusions de leurs ministres de Défense, c’est ainsi que les présidents de la Rdc, de la Tanzanie et du Sud-Soudan sont obligés d’attendre. Mais cependant, renseigne la consoeur, Paul Kagame a préféré se faire représenter par deux de ses ministres à savoir, James Kabarebe et Louise Mushikiwabo. Pour le journal, le fait de sécher ces assises par Paul Kagame signifie tout simplement que le chef de l’Etat rwandais n’accorde aucune chance à ses pairs de la sous-région de vivre en paix.

D’autre part, La Réf+ indique que le M23 vient d’assassiner le chef de localité de Rumangabo. M. Manishimwe Nshmiyimana Rwahinage, puisque c’est de lui qu’il s’agit,a été abattu vers 19 heures, la nuit de mercredi à jeudi de la semaine en cours.. Un groupe d’éléments M23 a investi sa parcelle avant que certains d’entre eux ne s’introduisent dans son domicile.

La grande misère de l’ACP.

C’est Radio Okapi qui annonce que l’Agence congolaise de presse (ACP) se débat dans des problèmes insolubles. Son bulletin de ne parait plus depuis lundi 3 septembre.

Le DG intérimaire de ce média public, Jean-Marie Vianney Longonya explique cette absence de parution par l’arrêt de la fourniture d’électricité et d’eau dans ses locaux depuis juillet. D’après certains, l’accumulation des arriérés remonterait aux années ‘90.
Un agent raconte que des employés de la SNEL (Société nationale d’électricité) et de la Regideso accompagnés par sept militaires sont arrivés, jeudi 12 juillet, dans les locaux de l’ACP pour couper l’eau et l’électricité. L’agence accuse un retard de paiement des factures de la Snel dont le montant s’élève à environ 500.000 $. Certains journalistes expliquent que l’accumulation des arriérés de factures d’ACP remonte aux années 1990.
La Snel aurait exigé le paiement du dixième de ces arriérés [50.000 $]. Mais les responsables de l’agence n’auraient décaissé que 750 $.
Depuis, l’agence a commencé à recourir à un groupe électrogène. Mais celui-ci ne fonctionne que trois heures par jour, de 13 à 16 heures. Le dimanche 2 septembre dans la soirée, le groupe électrogène tombe en panne. Les bulletins de l’agence ne peuvent plus être produits. Jean-Marie Vianney Longonya, directeur général intérimaire du média, assure que le comité de gestion est en pourparlers avec la Snel pour rétablir l’électricité. Il assure que le bulletin de l’ACP paraîtra à partir de la semaine du 10 septembre. De leur côté, les agents de ce média accusent leurs responsables de mauvaise gestion.

Certains observateurs estiment que la Radio télévision nationale congolaise (RTNC) bénéficie de beaucoup plus d’avantages de la part du gouvernement que l’ACP, alors que les deux sont des médias publics. Ils évoquent notamment l’acquisition de camionnettes pick-up par le service de reportage de la RTNC au mois d’août alors que l’ACP ne dispose d’aucun véhicule. En 2006, la RTNC a bénéficié de bus pour son personnel, l’ACP non.
Interrogé par Radio Okapi, le ministre des Médias, Lambert Mende refuse de parler de traitement discriminatoire. Il parle plutôt « d’un problème de règlement intérieur et des statuts de l’ACP qu’il faut harmoniser », promettant un traitement identique pour les deux médias.

Divers

D’après Radio Okapi « Province Orientale : plusieurs villages bordant le lac Albert confrontés au cholera ».
Trente cas de choléra dont un décès ont été enregistrés depuis la semaine passée dans plusieurs localités situées au bord du lac Albert dans la zone santé de Tchomia en Ituri (Province Orientale).
Le médecin chef de cette zone santé, Docteur Hervé Bavi, a dit redouter une propagation rapide de l’épidémie à cause des mauvaises conditions hygiéniques dans ce milieu et de l’insuffisance des médicaments pour la prise en charge des malades.

« FFJ surpris par la coupure du signal d’une télévision proche de l’opposition à Kinshasa ».
Freedom for journalist (FFJ), organisation neutre de défense et de promotion de la liberté de la presse est désagréablement surpris par la coupure, jeudi 06 août 2012 à 21 heures (heure locale), du signal de Radio Lisanga Télévision (RLTV), une chaîne de télévision proche de l’opposition, émettant à Kinshasa.

Pour La Prospérité, FFJ, a constaté que le signal a été retiré à la chaîne pendant que « Tokomi wapi », une tranche politique très suivie dans la capitale, recevait José Makila, député de l’opposition et président d’un petit parti Alliance de travailleurs pour le développement (ATD) qui donnait sa lecture sur la situation de belligérance à l’Est de la RDC en proie à d’incessants conflits armés.

Une autre raison possible pour expliquer un redoublement des velléités d’entraver les possibilités d’expression de l’opposition, est que dans un mois le Sommet dela Francophonie s’ouvriira à Kinshasa et que, fatalement, on y reparlera des élections. Les élections du 28/11/11 ont donné des résultats qui, en réalité, sont encore inconnus. Les fraudes les plus importantes ayant eu lieu au niveau des centres de compilation, on ne pourrait se rapprocher de la « vérité des urnes » qu’en se référant aux PV des bureaux de vote, dernière opération publique et vérifiée par des témoins. Les chiffres de la CENI ne s’accompagnaient pas de ces PV, les chiffres publiés par l’UDPS, non plus. L’Eglise n’a jamais publié les résultats partiels constatés par ses observateurs. On n’a donc que des résultats dont la crédibilité est nulle. Les législatives ont été dignes de la présidentielle, sinon pires. Mais la CSJ a entériné les résultats de la présidentielle et des législatives.. Le temps s’est écoulé, les résultats des élections demeureront à jamais inconnus. Toute autorité prétendue ne relève plus que de la force, de l’intimidation, d’un coup d’état de fait. Le principal ressort de ce coup d’état consiste à progresser, comme si de rien n’était, dans les tâches qui suivent normalement une élection et à mettre le pays et le monde devant le fait accompli.

Presse et documents internationaux

Le Président ira au Congo
Boniface MUSAVULI – AgoraVox – 03/09/2012

Après des mois d’incertitude, la nouvelle est tombée comme un couperet. Le Président Hollande ira au Congo pour participer au 14ème sommet de la francophonie qui se tiendra à Kinshasa, en octobre prochain. Les opposants et les ONG ont cru jusqu’au bout que le « Président normal » s’abstiendrait d’un déplacement attendu pour être célébré comme une caution de l’Hexagone au régime antidémocratique et brutal de Joseph Kabila. Une déception qui en rappelle d’autres, mais pas tellement sur le fait que le Président français puisse se rendre dans un pays où la démocratie et les droits de l’Homme sont bafoués.

En effet, on sait que la démocratie et les droits de l’Homme ne sont pas une préoccupation majeure dans la logique des dirigeants français lorsqu’ils envisagent de traiter avec un régime ou un autre. Ce qui déçoit vraiment c’est l’atermoiement qui a suscité l’illusion que la « logique françafrique »[1] pourrait disparaitre avec le départ du « pragmatique » Nicolas Sarkozy. Mais on n’en voudra pas au Président Hollande puisqu’il a dû privilégier des considérations relevant de la « logique d’Etat », mais qui risquent de s’avérer infructueuses.

Car, même au plus profond du cynisme de la realpolitik, un régime n’a d’intérêt que si le pouvoir contrôle le pays, ce qui n’est pas le cas du Congo. De vastes territoires, y compris des zones minières, échappent complètement au contrôle de Kinshasa. Les seules structures qui tiennent à peu près la route sont la Mission de l’ONU (Monusco) et les ONG. Par ailleurs, sur la durée, la viabilité du régime n’est pas assurée. Le hold-up électoral de novembre 2011 a enclenché une crise de légitimité qui devrait durer au moins jusqu’en 2016, fin du mandat que le Président s’est octroyé. Selon la Constitution (article 70) il ne pourra plus se représenter et devra quitter le pouvoir. Il ne pourra même pas faire modifier la Constitution pour prolonger son règne puisque « le nombre et la durée des mandats du Président de la République (…) ne peuvent faire l’objet d’aucune révision constitutionnelle » (article 220).
La pérennisation du règne de Joseph Kabila est une éventualité qui ne passe pas, le régime étant vécu comme un boulet, dépourvu de la moindre réalisation de taille sur laquelle les Congolais pourraient accrocher le peu de fierté nationale qui leur reste.
Au fait, le régime que l’Elysée va adouber à Kinshasa – puisque le déplacement n’a pas d’autre motivation avouable – est un tel désastre structurel en matière de gouvernance, démocratie et des droits de l’Homme que la coopération de la France, si elle s’assume jusqu’au bout, risque de placer Paris en première ligne en tant que caution internationale des exactions qui font les gros titres de la presse. Contrairement aux dirigeants du Continent, les dirigeants en RD Congo ont la particularité de ne jamais assumer laissant le parrain étranger en première ligne. L’exemple le plus tragique est celui des casques bleus à qui il revient de tout faire en matière de défense nationale, y compris des tâches aussi basiques que l’information sur le déroulement des opérations, comme on a pu s’en rendre compte lors de la énième déroute de l’armée devant les mutins du M23. Il y a pourtant un Président, des ministres, un chef d’état-major, des commandants, des députés, des sénateurs,… Tous étaient aux abonnés absents pendant que leurs populations erraient dans la nature, chassées par les combats. Tous sont aux abonnés absents et avaient laissé leur peuple à la charge exclusive des ONG et de l’ONU. Il faut essayer de contacter un officier de l’armée indienne (Monusco) pour savoir ce qui se passe dans le Kivu.
Pendant ce temps, un discours déresponsabilisant et fataliste prospère. Les malheurs du Congo ont pour responsable la Belgique, ancienne puissance coloniale (cinquante ans après son accession à l’indépendance), le Rwanda et les lobbies occidentaux impliqués dans un vaste complot sur les minerais du pays. François Hollande va donc mettre les pieds dans un pays qui, pour de nombreux observateurs, n’est pas gouverné, et dont les dirigeants n’assument rien préférant se décharger sur les autres[2] lorsqu’ils ne leur abandonnent pas la charge totale de leurs propres populations. Pour pouvoir rapporter quelque chose à la France, y compris d’inavouable, le pays a besoin d’être piloté par un dirigeant compétent. L’affaire des minerais de sang qui « doivent » transiter par le Rwanda est révélatrice d’un manque d’envergure généralisé dans la personnalité des dirigeants congolais.
Sur le peu que le régime aurait pu réaliser, le bilan n’est objectivement pas assumable. Les dix ans de Kabila ont été un désastre sur le plan géopolitique, militaire, économique et social. Sur le plan géopolitique, le Congo de Kabila, géant stratégique à l’époque de Lumumba, grand Zaïre de Mobutu, est aujourd’hui un nain ridicule de la région, affligeant au-delà du raisonnable. Le peu de fierté nationale que Mobutu, malgré la dictature, a pu laisser sur le front du « Zaïrois », s’est totalement volatilisé. Les innombrables déroutes militaires dans le Kivu ont fini par désespérer les Congolais d’un bout à l’autre du pays..
Sur le plan économique, le régime de Joseph Kabila, en dépit des immenses réserves minières dont regorge le pays, est sans excuse, comparé aux autres pays de la région disposant de maigres ressources, mais devenus de « bons élèves » en matière de gouvernance. Le Congo est systématiquement parmi les derniers des classements en matière de pauvreté (178ème sur 183 – pays classement Banque mondiale, 185ème sur 185 pays -) et de corruption (164 sur 179 pays). Les richesses nationales sont dilapidées outrageusement. Le régime a par ailleurs conclu un méga contrat de 10 milliards de dollars qui prévoyaient la construction des infrastructures en échange de la livraison de minerais congolais à Pékin. Le contrat fut un flop monumental dont on ne retient, en parcourant le pays, que quelques routes et bâtiments mal faits et des chantiers inachevés. Une corruption gigantesque est passée par là, mais ce n’est pas la question du voyage du Président français au Congo. Juste pour rappeler qu’il se rend dans un des rares pays où la corruption est passée du stade de la honte nationale à celui d’obstacle insurmontable au développement. Selon l’économiste Oasis Kodila Tedika, 55% des recettes destinées au trésor public sont happées par la corruption. Il est assez évident qu’on puisse garder ses distances vis-à-vis d’un tel régime pour une France dont les dirigeants, tombés dans le piège de la françafrique, ont été éclaboussés par des scandales retentissants.
Sur le plan social, le régime, à ses débuts, a suscité des espoirs légitimes : des fonctionnaires payés, des infrastructures de base, des écoles, des hôpitaux ; la lutte contre les pandémies (malaria, sida,…), la malnutrition. Dix ans après, il n’en est rien. Les salaires dans la fonction publique sont, non seulement risibles, mais souvent impayés. Le fonctionnaire perçoit environ 50 dollars par mois. Le militaire, pourtant en guerre, perçoit environ 45 dollars (quand il est payé, puisque sa maigre solde est souvent détournée, ce qui l’oblige à se rabattre sur la population pour survivre). Les enseignants sont à la charge des parents.
Sur le plan de la sécurité et de la défense, le pays baigne dans l’insécurité et la confusion. En guerre depuis 1996, le Congo peine à se doter de moyens de défense efficaces. Tout ce que les Congolais retiennent du régime, ce sont les humiliations et les déroutes militaires notamment dans le Kivu et les vaines tentatives des casques bleus qui finissent, eux aussi, par déserter le champ de bataille et s’enfuir en laissant la population à la merci des groupes armées qui se livre par la suite aux massacres. Le drame c’est que dans la fuite des uns et des autres, on abandonne de grosses quantités d’armes et de munitions, y compris des chars d’assaut aux « forces négatives », les mettant en situation de relancer les hostilités à tout moment. 25 tonnes d’armements ont été abandonnées à Bunagana aux mutins du M23. Une « pratique » récurrente qui alimente le flou structurel dans un pays où, finalement, on ne sait vraiment qui est ennemi de qui et contre qui la nation se bat.
Pour le peuple congolais, l’ennemi juré c’est le régime rwandais qui menace l’intégrité du territoire. Mais après des années de négociations, de trahisons et de révélations, il s’avère que Joseph Kabila et Paul Kagamé sont plutôt « amis »[3], en dépit des hostilités entretenues entre leurs populations et leurs armées respectives. Une complicité qui se traduit par l’installation des agents rwandais à des postes de responsabilité dans l’armée et l’administration. On a pu penser un moment que François Hollande ne devrait pas se rendre à Kinshasa pour éviter de froisser le Rwanda avec qui Paris entretient des relations difficile. Il n’en sera rien parce que les Rwandais, il les trouvera à Kinshasa. Ils sont au cœur du régime de Joseph Kabila, ce qui est plutôt rassurant sur le plan diplomatique, du côté de Paris, mais pesant dans l’opinion congolaise. D’où des préoccupations en matière de sécurité, cette situation confuse venant s’ajouter à la crise politique et aux affrontements armés dans le Kivu. Il a été question, à un moment, de délocaliser le sommet vers un pays à peu près sûr.
Sur le plan politique, l’espoir d’un changement par des moyens démocratiques n’est plus de mise. La répression menée depuis novembre 2011 pour garantir le maintien du Président sortant au pouvoir se poursuit. Les opposants proches de l’UDPS d’Etienne Tshisekedi sont l’objet d’arrestations et d’agressions parfois physiques. L’un d’eux, le député Eugène Diomi Ndongala, est porté disparu depuis le 27 juin et serait, selon ses avocats, illégalement détenu dans les locaux de l’ANR (service de renseignement). Le régime fait, depuis, courir une rumeur scabreuse sur sa personne en l’accusant de viol. Ses proches redoutent qu’il subisse le même sort que celui des militants des droits de l’Homme Floribert Chebeya et Fidel Bazana[4] assassinés par un commando de policiers (bataillon Simba) aux ordres d’un très proche du Président, le Général John Numbi, un « intouchable » que la justice n’arrive même pas à inquiéter. Aux dernières nouvelles, on apprend que le député Diomi Ndongala serait décédé et que ses proches sollicitent l’aide de la France, notamment, pour que le régime concède à restituer la dépouille à sa famille.
Le sommet de la francophonie va donc se tenir dans un pays où règne un climat politique et sécuritaire exécrable. Madame Yamina Benguigui, Secrétaire d’Etat à la francophonie et très impliquée dans la tenue du sommet à Kinshasa, malgré la réprobation de l’opposition et des ONG, a subi des menaces de morts. Personne ne sait s’il faut les prendre au sérieux, mais du sang français a déjà coulé dans ce pays, et pas de n’importe qui[5].

A la lumière de ce tableau, il était hautement souhaitable que la France s’engage aux côtés du peuple congolais pour l’aider à pousser le régime de Joseph Kabila vers la sortie. Pas nécessairement en envoyant des troupes comme en Côte d’Ivoire, mais en prenant ouvertement position pour le changement. Aller adouber un tel régime revient à prolonger inutilement l’agonie d’un peuple sachant que les intérêts légitimes de la France seraient de toute façon préservés, voire bonifiés, en cas d’arrivée au pouvoir à Kinshasa des dirigeants acquis à la démocratie. Les Occidentaux ont traité avec le régime d’apartheid en Afrique du Sud mais réalisent des affaires bien meilleures aujourd’hui avec les dirigeants issus des luttes de Nelson Mandela. En réalité, le cynisme de la realpolitik n’est pas une fatalité. En fin de compte, on réalise qu’il y a toujours plus à gagner dans un système démocratique, où le respect des droits de l’Homme est garanti et où les dirigeants s’efforcent d’assurer une redistribution juste des richesses du pays au profit de leurs populations.

Francçafrique : Hollande au sommet de la Francophonie à Kinshasa
GASTON KELMAN[6] –Fraternité Matin (Cameroun) – 04 Septembre

Disons-le tout net : le Président français vient de marquer un point dans sa détermination à combattre la françafrique. Sa présence annoncée au sommet de la Francophonie à Kinshasa, porte un coup à la logique de la carotte ou le bâton. On récompense les bons élèves en leur serrant la main sur le perron de l’Elysée.

On leur rend une petite visite au son des tam-tams et des balafons, le petit peuple en danse, grimés dans des uniformes à l’effigie des deux chefs d’État, oripeaux de la vassalité. On leur promet des aides. Les mauvais élèves sont boudés. Le président français se rend en Rdc, non pour cautionner une quelconque politique, mais par respect du choix du pays d’accueil par les experts. Cette décision est d’autant plus importante que les tenants de la politique moralisatrice étaient légion et ont tenté par tous les moyens de s’opposer à ce voyage. La messe semblait dite quand j’ai rencontré deux hauts responsables socialistes très proches du dossier, un ministre et un ancien ministre. Tous deux m’ont dit qu’il était quasiment impossible de rattraper le coup. L’opposition de la Rdc ruait dans la cour du Quai d’Orsay et le président ne voulait pas paraître comme une caution du chef de l’État congolais dont l’élection était contestée. Je ne me suis pas découragé et je leur ai exposé mon point de vue. Nous avons gagné et je me félicite d’y avoir contribué. Je leur ai dit tout le respect que j’avais pour les oppositions en tout genre. Je leur ai dit que le président pouvait boycotter Kinshasa en attendant que cette opposition prenne le pouvoir. Je les ai mis en garde : quand l’opposition aurait pris le pouvoir, il s’en trouverait une nouvelle opposition pour ruer dans la cour du Quai d’Orsay..
Et puisque ce sont les rebelles et les oppositions qui semblent désormais être crédibles, on repartirait pour un nouveau tour des boycotts. Il est temps, ai-je soutenu, de mettre fin à cette forme de françafrique. Peut-on penser l’opposition plus représentative d’un pays que le pouvoir ? La Rdc est le plus grand pays francophone au monde. L’intérêt de la France est d’avoir de bonnes relations avec cet immense pays immensément riche. Que la France recherche ses intérêts dans le respect de la dignité des peuples. Que les rapports commerciaux soient justes et non des pillages comme s’en vantaient tous les protagonistes français du film documentaire sur la Françafrique. Que les oppositions fassent leur travail sans attendre la caution étrangère, travers que l’on reproche au demeurant aux dirigeants dont on a l’impression qu’ils reçoivent leur légitimité non de leur peuple, mais de la poignée de main avec le président français sur le perron de l’Elysée. Elle est souvent bien cocasse la course à l’échalote à laquelle se livrent les dirigeants des pays africains pour être les premiers reçus par un nouveau dirigeant français et je ne compte pas les ministres qui m’ont sollicité pendant mon bref passage dans un cabinet ministériel français, pour rencontrer mon ministre et aller s’en prévaloir auprès du président de leur pays. Et que dit l’opposition de cette décision du Président français ?
Le secrétaire général adjoint de l’Udps, principal parti d’opposition, Jean Marie Vianney Kabukanyi, a déploré que Hollande ait privilégié les intérêts de son pays au détriment de ceux des Congolais. On ne peut même pas en rire. Et je me souviens des propos que me tenait ce jeune homme rencontré au hasard de mes débats. Si la France décidait de mettre fin à la françafrique, ce sont les Africains qui crieraient au scandale, au lâchage. Est-il sérieux ce haut responsable de l’opposition, quand il feint de s’étonner que la France privilégie les intérêts de la France à ceux du Congo! L’opposition congolaise considère la participation de François Hollande à ce sommet comme une légitimation de la victoire du Président Joseph Kabila qu’elle conteste. Pourquoi traiterait-on avec Poutine et non avec Kabila ? La Rdc appartient à tous les Congolais. L’organisation d’une manifestation d’importance dans un pays ne devrait pas être une légitimation du pouvoir en place, mais une reconnaissance de la capacité du pays à accueillir un tel événement. Dès lors, tous les citoyens doivent se saisir de cette opportunité pour valoriser leur pays aux yeux des participants. Pour revenir à notre propos initial, nous ne pouvons que nous féliciter de cette évolution du regard de la France sur ses rapports avec les pays africains. Maintenant, il reste une autre bastille à renverser. Et là, le combat est d’une autre dimension. Le président français qui mettra fin à cette horreur anachronique, à cette séquelle de la colonisation, à ce pivot de la postcolonie qu’est le franc Cfa, celui-la sera le vrai père de la décolonisation et le fossoyeur de la françafrique. Peut-être que les choses s’accéléreraient un peu si les États africains qui regorgent de financiers et d’économistes, s’engageaient, les premiers, dans cette voie de libération de leurs peuples.

RDC : Quand Mende « débrief » Kabarebe
Christophe RIGAUD – Afrikarabia – 04 septembre 2012

Nouvelle passe d’armes entre Kinshasa et Kigali. Le porte-parole du gouvernement congolais, Lambert Mende, est revenu sur les déclarations de James Kabarebe, le ministre de la défense rwandais. Dans un entretien, James Kabarebe avait nié le soutien de Kagali aux rebelles du M23 et avait violemment attaqué l’armée et le gouvernement congolais. La réponse n’a pas tardé.

Dans une interview au journal Le Soir, le ministre rwandais de la défense, James Kabarebe avait fermement réfuté tout soutien du Rwanda aux rebelles du M23. Un récent rapport de l’ONU avait accusé Kigali de fournir des hommes et des armes au M23, qui se bat contre l’armée congolaise à l’Est de la République démocratique du Congo (RDC). Kabarebe affirmait que « chaque fois que quelque chose ne va pas au Congo, on désigne le Rwanda ». Au sujet de l’armée congolaise et de son gouvernement, les attaques étaient nettement plus virulentes : « au Congo il n’y a ni gouvernement ni armée, seulement un grand vide ». Ou encore concernant l’armée : « ils ont échoué parce qu’ils ne peuvent pas se battre. Dans les conditions où ils se trouvent, ils ne tueraient même pas un rat… ».
Propos « arrogants »
Dans sa conférence de presse du 3 septembre, le ministre de l’information de RDC, Lambert Mende en a prfité pour « débrief » l’interview de Kabarebe : « les propos arrogants et discourtois du ministre rwandais à l’encontre du leadership congolais sont révélateurs d’un état d’esprit malsain dans les hautes sphères du pouvoir au Rwanda à l’égard de la RDC et de son peuple ». Selon Lambert Mende, « le gouvernement rwandais s’agite parce qu’il digère mal son échec diplomatique dans la énième crise qu’il a suscitée chez nous ». Et de s’étonner : « pourquoi de tous les neuf voisins de la RDC, seul le Rwanda souffrirait des conséquences de cette prétendue mauvaise gouvernance ? »

Contre-feu
Lambert Mende en a également profité pour immédiatement lancer un contre-feu concernant la polémique sur le retrait de plus de 300 soldats rwandais du territoire congolais. Vendredi, Kigali annonçait en grande pompe le départ de quelques centaines d’hommes de RDC, provoquant une vive controverse dans l’opinion congolaise qui croyait ces soldats partis depuis… 2009 ! L’annonce de Kigali était visiblement destinée à mettre dans l’embarras les autorités congolaises au sujet de la présence « officieuse » de troupes rwandaises chez lui. Pour Lambert Mende, l’opération de retrait menée par Kigali prouve l’existence de soldats rwandais à l’Est de la RDC (ce que Lambert Mende ne dit pas c’est si Kinshasa était courant) et donc validerait le « soutien » de Kigali aux rebelles du M23, qui se trouvent être dans la même zone. Le porte-parole du gouvernement accuse également Kigali d’avoir profité de ce retrait pour « exfiltrer » certains de ses hommes qui « soutenaient » le M23. Selon Lambert Mende, les soldats rwandais ont « préféré rentrer au Rwanda par une zone sous contrôle de la pseudo-mutinerie du M23. Pire, Kigali a refusé toute présence de la Monusco au titre de témoin international de ce mouvement de retrait »… preuve de l’ambiguïté sur la mission de ces soldats rwandais.

Double-jeu ?
L’ambiance s’est donc nettement tendue entre la RDC et Rwanda. Les alliés d’hier se sont lancés dans une course aux invectives qui ne fait (pour l’instant) que renforcer le sentiment violemment anti-rwandais qui prédomine en RDC et principalement dans la capitale, Kinshasa. Il faut dire que depuis 2009, les autorités congolaises avaient déjà toutes les peines du monde à essayer de convaincre son opinion de l’intérêt de son rapprochement avec Kigali. Car jusqu’à l’arrestation du rebelle Laurent Nkunda, le 23 janvier 2009, le Rwanda était alors soupçonné de soutenir la rébellion tutsie du CNDP (comme aujourd’hui avec le M23). Avec l’arrestation de Nkunda, Kagame et Kabila se sont rapprochés, jusqu’à mettre en place des opérations armées conjointes congolo-rwandaises à l’Est du pays. Aujourd’hui, alors qu’une nouvelle rébellion agite le Nord-Kivu, le Rwanda est de nouveau pointé du doigt. Les Congolais ont donc un peu de mal à croire leur gouvernement, lorsque, la main sur le coeur, il dénonce le plan machiavélique de Kigali pour « balkaniser » les Kivus. L’opposition croit plutôt que le pouvoir est toujours sous influence de Kigali et joue double jeu.

Haute Trahison ?
Le 4 septembre, une vingtaine de partis d’opposition demande une mise en accusation pour « haute trahison » du président Joseph Kabila. En cause : la guerre dans les Kivus. Selon les signataires du texte, Joseph Kabila est responsable du fameux accord du 23 mars, dont la rébellion du M23 revendique l’application. Pour l’opposition, « le contenu de cet accord a été délibérément caché, tant aux institutions qu’à la population congolaise ». Sous-entendu : l’accord donnait trop de place aux rebelles du CNDP (devenu M23 aujourd’hui). Le texte de cette coalition d’opposition estime « totalement établie la complicité du pouvoir (Kinshasa, ndlr) avec les agresseurs (Kigali, ndlr) ». En attendant, le gouvernement congolais compose un numéro d’équilibriste, qui sera de plus en plus difficile à tenir avec le temps.

Rwandais au Kivu : Kabila en difficulté
Marie-France Cros – La Libre – le 04/09/2012

L’annonce du retrait de troupes rwandaises admises au Kivu fait l’effet d’un coup de tonnerre dans l’opinion. Elle mobilise l’opinion contre le chef de l’Etat.

L’annonce, vendredi, par Kigali, que le Rwanda « retirait les deux compagnies de ses forces spéciales qui travaillaient aux côtés de leurs homologues des FARDC (NdlR : armée congolaise) dans un bataillon conjoint opérant à Rutshuru, au Nord-Kivu », a suscité un tollé au Congo, où la majeure partie de l’opinion ignorait ou avait oublié que des soldats rwandais se trouvaient toujours en territoire congolais.
Les deux pays sont en effet à couteaux tirés, depuis des semaines, en raison d’un rapport d’experts de l’Onu indiquant que Kigali a armé, équipé et soutenu par l’envoi de recrues la mutinerie congolaise du M23 au Nord-Kivu. Ces derniers jours, les deux capitales s’expliquent devant le Comité de l’Onu pour les sanctions et le ministre congolais des Affaires étrangères a évoqué – le jour même de l’annonce rwandaise – une « situation de guerre » entre les deux pays.
L’annonce du retrait rwandais a semé une certaine confusion côté congolais, où le porte-parole du gouvernement a d’abord indiqué ce week-end, selon Radio France internationale, ne pas être informé « d’une présence non autorisée des forces rwandaises après la fin des opérations conjointes depuis le 25 février 2009″.
De son côté, le ministre congolais de la Défense, Alexandre Luba Ntambo, indiquait que les forces évoquées par Kigali faisaient partie d’un bataillon « public » et « officiel », mis en place en mars 2011, composé de deux compagnies de forces spéciales congolaises et deux rwandaises, chargées de combattre ensemble les FDLR (rebelles hutus rwandais issus des génocidaires).
Dimanche, le porte-parole a indiqué que le nombre d’hommes concernés « ne pouvait pas dépasser 50″ (deux compagnies feraient environ 280 hommes) affectés à la surveillance conjointe de la frontière commune. Et d’ajouter : « Nous savons que, dans les discussions que nous avons eues avec eux pour cette surveillance commune, il ne devrait pas y avoir plus de 100 officiers de chaque côté. »
Rien n’est dit, cependant, pour expliquer pourquoi les forces rwandaises se trouvaient encore au Congo jusqu’au week-end dernier, alors que le président Kabila avait annoncé en avril dernier la fin des opérations contre les FDLR – annonce qui avait mécontenté Kigali et, selon plusieurs analystes, expliquerait les raisons pour lesquelles les autorités rwandaises auraient aidé le M23, créé le 6 mai, soit après l’annonce de la fin des opérations contre les FDLR.
Quoi qu’il en soit, l’annonce a fait l’effet d’un coup de tonnerre dans la rue congolaise et sur Internet, où nombreux sont les opposants à Joseph Kabila qui l’accusent de « haute trahison » , en reprenant les vieilles accusations selon lesquelles il n’est pas congolais mais rwandais. Beaucoup de Congolais de la rue ne peuvent s’expliquer qu’ainsi l’incapacité de leur armée (95 000 hommes) à mettre fin à la mutinerie du M23 (300 hommes au départ, 400 à 600 aujourd’hui, selon une source onusienne).
Les élections frauduleuses, à l’issue desquelles Joseph Kabila s’est maintenu au pouvoir, et la répression de toute contestation de ces résultats, ont accentué l’impopularité du chef de l’Etat là où il était déjà peu aimé. Ainsi, à Kinshasa, on signale que dans la foule qui marche chaque jour pendant des heures, faute de transports en commun, le long des grandes artères, des groupes de piétons entonnent maintenant des hymnes religieux dont ils modifient les paroles en : « Seigneur, tue Kabila comme tu avais tué son père »; tapent sur les véhicules; chantent l’hymne national de Mobutu, « La Zaïroise », et des chants de l’ex-parti unique à la gloire de Mobutu, repris en chœur par des passants.

Francophonie : Vers un sommet houleux pour Paul Biya à Kinshasa
Georges Alain Boyomo – Le Quotidien Mutations (Cameroun) – 05/09/2012

A l’occasion de sa première visite en Afrique, François Hollande promet de «tout dire» à ses homologues africains.

Le suspense est rompu depuis le 27 août dernier. Le président de la République française, François Hollande, se rendra bel et bien à Kinshasa du 12 au 14 octobre prochain, à l’occasion du Sommet de la francophonie qu’accueille la République démocratique du Congo (Rdc). Jusqu’à cette date, le locataire de l’Elysée semblait indécis, car plusieurs associations l’avaient appelé à «ne pas se rendre à Kinshasa », pour ne pas conforter le régime de Joseph Kabila, qui dirige le pays depuis 2001. L’Union pour la démocratie et le progrès social (Udps), le principal parti d’opposition en Rdc, présidé par Etienne Tshisekedi, avait même réclamé la délocalisation du Sommet de la francophonie, tandis qu’une association de Français d’origine congolaise avait saisi la justice française pour empêcher la tenue de la réunion.
Toutefois, dans sa démarche, François Hollande a tenu, devant la conférence des ambassadeurs réunie à l’Elysée, à situer les enjeux de sa visite à Kinshasa, la première en Afrique depuis son élection le 6 mai dernier. «Je me rendrai dans quelques semaines au Sommet de la francophonie à Kinshasa. J’y réaffirmerai que la Francophonie, ce n’est pas simplement une langue en partage, mais aussi une communauté de principes et d’idéaux dont le rappel à chaque occasion est nécessaire, et notamment en Rdc, mais pas seulement là », a déclaré le chef de l’Etat français. Avant d’ajouter : «J’y rencontrerai l’opposition politique, les militants associatifs, la société civile. C’est le sens de la nouvelle politique africaine de la France : tout dire partout et faire en sorte que ce qui soit dit soit fait ».
A l’analyse, il semble évident, qu’à Kinshasa, François Hollande ne s’adressera pas uniquement à la classe politique congolaise, mais à tous les dirigeants africains, dont Paul Biya, question de réaffirmer sa détermination à répudier la Françafrique, et partant à repenser le rôle d’accompagnement de la France sur le continent, en matière de démocratie et de promotion des droits de l’Homme.
Annoncé à ce sommet, Paul Biya ne devrait passer entre les gouttes du discours très attendu de François Hollande sur la nouvelle orientation de la politique française en Afrique. Déjà, dans son message adressé à M. Biya le 22 mai dernier, à l’occasion de la fête de l’unité nationale, le président Hollande avait fixé le cap : «En matière politique, je souhaite de tout cœur qu’un cadre durable et propice au dialogue entre toutes les forces politiques camerounaises puisse se mettre en place dans la perspective des prochaines échéances électorales ».
Allusion à peine voilée à la discorde entre le pouvoir et l’opposition au sujet du code électoral promulgué le 17 avril dernier par le président de la République, Paul Biya. Le chef de l’Etat camerounais, qui n’a pas eu jusqu’à ce jour le privilège d’être reçu par M. Hollande à l’Elysée affichera-t-il, à Kinshasa, le masque d’un mauvais élève de la démocratie devant son maître ? Ou alors fera-t-il prévaloir, comme à son habitude, l’exception camerounaise dans un monde qui bouge ? Rien n’est moins sûr. Mais, autant l’écrire : le premier tête-à-tête entre Biya (79 ans, bientôt 30 ans au pouvoir) et Hollande (58 ans, cinq mois au pouvoir) s’annonce houleux.

François Hollande au prochain sommet de la Francophonie !!!

Constant Ory – C4N – 05-09-2012

François Hollande a décidé de se rendre au XIVe sommet de la Francophonie devant se tenir cette année en République Démocratique du Congo du 12 au 14 Octobre, tout en essayant de persuader l’opposition congolaise qui ne voit pas cela d’un bon œil, que cette manière de faire est différente d’une quelconque caution à l’élection décriée du Président actuel, Désiré Kabila !

Ayant une autre perception de la Francophonie que ses prédécesseurs, il arrivera sûrement à les convaincre quant à sa bonne foi de voir une Afrique plus moderne et démocratique ! Peut-être profitera-t-il de sa présence en terre congolaise pour amener le pouvoir en place et l’opposition à s’accorder sur un point d’ensemble qui prend en compte l’intérêt intégral de leur nation ! La République Démocratique du Congo, depuis le renversement de Mobutu Sessé Seko par Kabila-père, est toujours en proie à des bruits de canon, à des guerres sans tête ni queue qui endeuillent sans cesse sa population et sa riche faune.

Si les autorités actuelles voient au Rwanda, un adversaire de poids dans cette longue guerre qui ensanglante leur pays, Kagamé, qui vient d’y retirer sa troupe, veut montrer son intention de ne plus être impliqué de près ou de loin dans les affaires intérieures de la République Démocratique du Congo tiraillée par plusieurs intérêts, rappelant la mort atroce du célèbre Premier Ministre des années de l’indépendance, Patrice Lumumba ! A la manière des autres pays africains ayant un sous-sol riche ! Qu’importe l’aspect touristique réservé par ce pays à travers ses gorilles et autres !

François Hollande, il faut le reconnaître, d’emblée, n’ira pas en visite de villégiature dans ce pays ! Il lui faudra une hauteur d’esprit et de la justesse dans les idées pour accorder les violons au son de la rumba congolaise qui a fait danser l’Afrique durant de longues années. Y arrivera-t-il ? Nous attendons le prochain sommet de la Francophonie pour en savoir davantage…

RDC : De nouveaux conflits dans l’Est

Lamine Thiam – Abidjan.net – 06/09/2012

Les Kabila père et fils ont sans doute fait entrer le loup dans la bergerie congolaise. Comme on le dit prosaïquement, le Rwanda se paie sur la bête et ce depuis plus de 20 ans. L’Est de la RDC : richesse minière, objet de convoitise des voisins et des rapaces internationaux sans compter la dimension ethnique. Equation insolvable ?

Du CNDP au M23
Comme en 2008, le Nord Kivu est de nouveau rentré en éruption. Cela fait maintenant quatre mois que le Mouvement du 23 mars 2009 (M23) a repris le chemin des armes le long des frontières que la RDC a en partage avec ses voisins : l’Ouganda et le Rwanda.
Comme un volcan en sommeil et qui se réveille aujourd’hui, cette guerre charrie son cortège d’horreurs : des centaines de morts dont des civils, des femmes violées, des centaines de millier de réfugiés sur les routes pour tenter de s’éloigner des zones de combat. Plus le conflit se durcit et s’étire en longueur, les défections de part et d’autre obligent les belligérants à élargir leur base de recrutement ; ainsi la tentation est grande de vouloir recruter des enfants soldats ou de faire des appels de pied aux anciennes milices.
Le M23 est une émanation du Congrès National pour la Défense du Peuple (CNDP) dirigé par le général Laurent Nkunda. Dans cette région du Kivu vivent depuis fort longtemps des rwandais en majorité des tutsis qui ont revendiqué la nationalité congolaise, au lendemain de l’Indépendance du Zaïre, que le maréchal Mobutu finit par leur donner en 1972. Bien qu’ils se considèrent comme des congolais à part entière, il existe toujours chez eux cet élan de patriotisme, cette fibre tutsie car ils sont toujours jugés comme des citoyens de seconde zone en RDC. Et aussi cette fierté qui les rattachent au pays ; donc du pouvoir de Paul Kagamé à Kigali.
D’ailleurs, Laurent Nkunda est un pur produit du Front Patriotique Rwandais (FPR) tout en étant membre du Rassemblement Congolais pour la Démocratie (RCD). L’enfant du Nord-Kivu faisait partie de l’armée de Paul Kagamé qui a marché sur Kigali en juillet 1994. Les réfugiés hutus en RDC qui ont créée l’Armée de Libération du Rwanda (ALR) – devenue en 2000 FDLR – et les milices Interahamwes sont ses principaux ennemis. En 1997, il participa activement au triomphe de Laurent Désiré Kabila (Mzee) qui débouta Mobutu de son trône. Laurent Nkunda ne marcha pas jusqu’à Kinshasa mais on lui confia le contrôle de la province orientale et surtout de couver un certain Joseph Kabila.
A l’arrivée au pouvoir de Mzee, les combattants rwandais sont intégrés au sein des Forces Armées Congolaises. Mais Mzee s’est senti envahi par ses anciens alliés et finît par rompre avec le président Paul Kagamé. Ce fût la 2nde guerre civile de 1998 qui opposa les soldats congolais et ses supplétifs pour essayer de repousser les rwandais hors de la RDC. Militaire aguerri, Laurent Nkunda « le général renégat » est soupçonné d’être le responsable de plusieurs exactions, d’enrôlement d’enfants-soldats et de crimes contre l’humanité dans la province Est. Mais il a toujours le soutien du Rwanda. Il a donné du fil à retordre aux congolais jusqu’en 2004 et même au-delà c’est-à-dire en 2009. Il créa alors le CNDP qui contrôlait le Nord-Kivu. Il avait de l’ambition pour ce mouvement militaro-politique qui à terme, selon lui, deviendrait autonome et revendiquerait un territoire : un « tutsi land ». Le CNDP est structuré administrativement et se finançait par les gabelles prélevées sur le commerce, le cheptel ainsi que d’exploitation clandestine de minerais de la région. En 2007, à son apogée, fort de 5 à 7.000 hommes le général Nkunda voulait s’emparer de ville de Goma avec ses lieutenants sanguinaires et réputés comme Kakokele et Bosco Ntaganda qui l’ont rejoint en 2000.
L’ombre portée par le CNDP et la réputation sulfureuse de « terminator » Bosco Ntaganda finirent par inquiéter la communauté internationale. Car, mieux équipés et très aguerris, ses hommes pouvaient réellement menacer le pouvoir central en RDC. Les Etats-Unis ont dû exercer une amicale pression auprès de leur protégé Paul Kagamé. Donc le temps était venu pour celui-ci de donner un sens à sa fameuse phrase proférée en 2008 : « si Nkunda devenait un problème pour le Rwanda, je saurais ce qu’il faut faire ». Ce dernier finît par lâcher son lieutenant. Concomitamment, la CPI lança un mandat d’arrêt international contre Bosco Ntaganda pour enrôlement d’enfants-soldats en Ituri. Pour échapper à ce triste sort, ce dernier négocia secrètement son intégration au sein de l’armée congolaise. A la faveur de ce brusque renversement d’alliance, il y eût une migration d’une grande majorité d’officiers du CNDP qui penchèrent vers Bosco Ntaganda.
Dès lors, privé de son état-major, les jours de Laurent Nkunda étaient comptés. Une coalition des deux armées – congolaise et rwandaise – commençait à traquer celui-ci ; jusqu’à son arrestation en janvier 2009.
L’accord entre le CNDP et le gouvernement de Joseph Kabila pour mettre fin à la rébellion par l’intégration du mouvement politico-militaire dans la société congolaise fut signé le 23 mars 2009 dans la capitale de la province, Goma !

La résurgence de la violence actuelle
Les soldats rebelles furent ainsi intégrer au sein de la FARDC et la branche politique du CNDP rallie l’écurie de l’Alliance pour la Majorité Présidentielle de Joseph Kabila. Cet attelage marcha cahin-caha car dès septembre 2010, les officiers de l’ancien mouvement paramilitaire faisaient état du peu de considérations à leurs égards pour dénoncer une sorte de tribaliste au sein de la grande muette. Et surtout les moyens promis pour leur permettre de chasser leurs ennemis jurés, les hutus du FDLR, n’ont pas été à la hauteur de ce qu’ils attendaient.
Après les élections présidentielles et législatives de novembre 2011, le président Joseph Kabila avait sans doute commis les mêmes erreurs que son père. Reconduit pour un nouveau mandat de cinq ans, il a voulu se débarrasser de cet allié encombrant. La communauté internationale et la CPI ont exercé une pression sur le gouvernement congolais lequel se voyait reprocher une protection bienveillante à l’égard du général Bosco Ntaganda.
Mais l’enclavement de cette région de l’Est (Masisi) a également empêché le bon déroulement du scrutin. Les matériels électoraux (isoloirs, bulletins de vote) n’ont pas pu être acheminés à temps. Les élections ont été entachées d’irrégularités et même des foyers de tension se sont alors embrasés faisant plusieurs blessés.
Résultat : la CENI a purement annulé les résultats des élections législatives dans cette région de l’Est. Le CNDP soupçonne alors le président sortant d’une part d’avoir gagné grâce aux fraudes et d’autre part de leur avoir surtout privé de représentants au sein de l’Assemblée Nationale.
Le M23 joue désormais sur deux tableaux : d’abord politique en demandant au gouvernement congolais de respecter les accords passés ; ensuite sur le terrain militaire.
Plutôt que d’attendre de se faire livrer par les autorités congolaises à la CPI, le général Bosco Ntaganda a préféré prendre le maquis en se retirant dans le parc des Virunga. L’endroit est pour le moins stratégique. Limitrophe des frontières de l’Ouganda et du Rwanda, de plus il est difficile d’accès, il sert aussi de base-arrière pour acheminer des armes, des pick-ups et du matériel neuf des deux voisins de la RDC. Les FARDC en guenilles, mal équipées ne font pas le poids face à des soldats déterminés et qui sont rompus à ce genre de guérilla. En juillet dernier, les hélicoptères de la MONUSCO ont été obligés de se déployer pour freiner l’avancée des mutins à Kibumba, verrou stratégique avant la ville de Goma.
Le M23 comme sa branche aînée le CNDP essaye d’avoir le cœur de la population dans les villes qu’il occupe au fur et à mesure de leur conquête. A coup de déclarations, il annonce l’instauration d’une administration qui se substituerait à l’Etat central défaillant.

Paul Kagamé mis au ban des nations ?
Les Nations-Unies ont enfin eu le courage de dénoncer le soutien de Kigali aux forces rebelles du M23. Lorsque Joseph Kabila qualifie de « secret de polichinelle » le soutien du Rwanda à la création du M23, son homologue Paul Kagamé rétorque qu’il ferait mieux de gérer les problèmes internes au Congo que de trouver un bouc-émissaire.
A quoi sert la Conférence Internationale sur les Grands Lacs (CIRGL) ? Les ministres des Affaires Etrangères et les chefs d’Etats de la région des Grands Lacs voguent de réunion en réunion pour évoquer la situation sécuritaire dans l’Est de la RDC. Cette question a même fait l’objet d’une session extraordinaire en marge du Sommet de l’UA en juillet dernier à Addis-Abeba. La CIRGL a décidé de l’envoi d’une force neutre financé par l’UA et les Nations-Unies alors que l’Ouganda et le Rwanda, membres de ladite CIRGL ne cessent d’envoyer des nouveaux moyens logistiques pour affaiblir encore plus la RDC. Chercher l’erreur !
Et la MONUSCO ? Si les Nations-Unies avaient voulu en finir avec ce conflit qui, en deux décennies, a fait des millions de morts elles se seraient prises autrement. Ce qui laisse toujours penser qu’il y a des intérêts des puissances industrielles occidentales à cette situation humanitaire désastreuse.
La condamnation unanime de Paul Kagamé est assez inédite pour qu’elle mérite d’être mentionnée. Du Conseil de Sécurité de l’ONU à la Belgique en passant par la Grande-Bretagne, tous dénoncent aujourd’hui, l’attitude du Rwanda qui ne cesse d’entretenir un foyer d’insurrection pour arriver à ses fins : avoir la main mise sur la richesse minière d’une partie de la province orientale de la RDC. Historiquement, Kigali considère qu’elle lui appartient. Désolé, mais votre serviteur sera encore obligé de vous ressasser sa marotte sur le partage du continent africain par les puissances coloniales lors de la conférence de Berlin en 1885. Cette intangibilité des frontières fût ensuite gravée dans le marbre par l’OUA en 1963. Le Rwanda et le Burundi étaient rattachés à la Tanzanie qui était une possession allemande. La défaite de l’Allemagne lors de la 1ère Guerre Mondiale a permis au Royaume de Belgique de récupérer le Rwanda et le Burundi. Et les rwandais souhaitent recouvrer une partie de leur terre qui aurait été passée de l’autre côte de la frontière zaïroise.
Signe du temps : la secrétaire d’Etat américain Hillary Clinton, lors de sa tournée estivale chez les « alliés » et les « démocrates » africains n’a pas fait escale à Kigali. Les Etats-Unis, la Suède, les Pays-Bas et le Royaume-Uni ont décidé de geler leurs aides au développement en faveur du Rwanda. Le président Paul Kagamé réplique par la fameuse Agaciro (littéralement la dignité). Cette initiative fait appel au sens du patriotisme pour les rwandais de l’intérieur comme de l’extérieur. Il s’agit de lancement d’un fonds de solidarité pour s’affranchir des aides étrangères. Même si cette initiative était déjà dans les cartons depuis un an, elle s’apparente plutôt à une campagne de communication car les moyens et les objectifs à moyen terme ne sont pas encore définis.

La poudrière de l’Afrique Centrale
Voilà plus de 20 ans déjà que cette région-là de l’Afrique n’a pas connu une paix durable. L’axe des Grands Lacs est sujet à de tensions permanentes en raison de facteurs ethniques, économiques et géopolitiques. Une accalmie à court terme est dans l’ordre du possible. Le désarmement des différentes factions rebelles encore moins les médiations internationales et autres tentatives de règlements frontaliers n’ont jamais pu juguler définitivement le conflit. La RDC finira peut-être un jour par se faire « balkaniser » ?

François Hollande à Kinshasa pour accompagner nos combats?
Roger Gbégnonvi – blog personnel – 06/09/2012

Nous avons espéré, sans trop y croire, qu’il n’irait pas, que le nouveau président français snoberait le prochain sommet France-Afrique pour apporter du baume à nos cœurs endoloris par nos démocraties fortement biaisées et terriblement autocratiques. Notre scepticisme l’aura, hélas, emporté : François Hollande se rendra à Kinshasa en octobre prochain et, – protocole oblige – nous le verrons sourire à nos chefs incapables de différencier entre démocratie et autocratie. Au demeurant, nous n’avons pas de plainte à élever contre les futures amabilités kinoises en France-Afrique parce que, à la vérité, notre espérance manquait de réalisme au regard de ce qui aurait dû nous apparaître comme une nécessité absolue de la politique africaine de la France.

Dans les années 70, en aidant militairement Mobutu à se maintenir au pouvoir contre vents et marrées intérieurs, la France giscardienne avait fait tomber définitivement dans l’escarcelle française le Zaïre, anciennement Congo-Belge, dont chacun sait qu’il est un ‘‘scandale géologique’’. La France hollandienne ne peut pas brader cet acquis, prendre le risque de voir le joyau de la RDC se détacher de l’Hexagone pour s’arrimer à quelque remorqueur américano-ougandais ou sud-africain et se mettre à ‘‘causer anglais’’, comme c’est déjà le cas au Rwanda voisin, qui a d’ailleurs sur le vaste pays des visées passablement captatrices. Pour le compte de qui ? La nouvelle géopolitique en train de se dessiner dans la région dite des Grands-Lacs n’autorise pas François Hollande à détricoter la France-Afrique ; bien au contraire, il a reçu mandat intime de la renforcer.Il fera donc son devoir et tout son devoir en se rendant à Kinshasa au sommet France-Afrique. François Hollande ira à Kinshasa pour – dixit lui-même – ‘‘tout dire et faire en sorte que ce qui est dit soit fait’’. Nous accueillons avec amitié cette affirmation et voulons ne pas la considérer comme une pétition de principe qui n’engage pas son auteur à grand-chose. Nous sommes toutefois certains que le discours du nouveau président français à Kinshasa n’aura rien de commun avec celui de son prédécesseur immédiat à Dakar, et c’est déjà ça. Il ressemblera certainement beaucoup plus à celui de son autre prédécesseur parlant au sommet France-Afrique de La Baule, et dont la parole nous avait encouragés à regarder en face nos autocrates, avec des résultats plutôt mitigés, puisque beaucoup d’entre eux en sont toujours à flirter avec l’autocratie sous couvert de démocratie. A quelles nouvelles audaces nous encouragera le discours hollandien de Kinshasa ?
A toujours attendre des autres qu’il nous aide, nous risquons de laisser penser encore et toujours que ‘‘l’homme africain n’est pas assez entré dans l’histoire’’. Or il y est de plain-pied, marchant difficilement mais avec constance sur le chemin des conquêtes démocratiques et des droits de l’homme. Gentiment, les Sénégalais ont poussé dehors leur président démocrate tenté par l’autocratie. Pour botter en touche le leur démocrate en route vers une vraie fausse couronne de monarque, les Nigériens ont dû prendre le taureau par les cornes. Les Togolais, rejoints récemment par les Gabonais, risquent la prison et la mort pour arriver à bout des dynasties qui les corsètent sous couvert de démocratie. Les Béninois, énigmatiques à souhait, snobent les médias caporalisées et sourient, goguenards, à la vue des chars noctambules, l’air de s’interroger : mais à qui donc veut-on faire peur ? Ils n’ont plus peur, ils attendent leur heure. D’autres peuples corsetés préparent la leur dans un fourmillement pas toujours visible sans loupe.
C’est pour dire qu’à Kinshasa, s’il parle démocratie non biaisée et droits humains véritables,François Hollande, par-dessus la tête de nos autocrates tenaces, s’adressera à des peuples décidés et en marche. Il les aidera autant qu’ils l’aideront à ‘‘faire en sorte que ce qui est dit soit fait’’. C’est cela aussi, le donnant-donnant. De toute façon, forts de nos acquis à consolider, forts de nos avancées à sauvegarder, nous attendons le voyage de François Hollande à Kinshasa comme une bonne nouvelle pour la France et pour la France-Afrique. Son discours ne nous laissera pas indifférents s’il vient nous accompagner dans nos combats pour la démocratie et pour les droits de l’homme.

Kabila et Hollande, des efforts réciproques à faire…

Journal de Bangui – A.P – 07/09/2012

Kinshasa accueillera le quatorzième Sommet de la Francophonie en octobre. Ça y est. Tu recevras François Hollande en octobre », peut bien être le texto qu’adresserait Alassane Ouatara, le président ivoirien à son homologue de la République démocratique du Congo pour lui annoncer la décision du chef de l’exécutif français de participer au sommet de la Francophonie à Kinshasa. Car, depuis des mois, Joseph Kabila s’impatience et s’agace de l’attitude de François Hollande qui, on le sait, pose des conditions à sa venue à Kinshasa. De source sûre, le nouveau locataire de l’Élysée conditionnerait sa participation au sommet de Kinshasa à une réforme de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni), ce qui garantirait la transparence des futures élections provinciales, et au jugement des « vrais coupables » dans l’affaire Floribert Chebeya. Une attitude qui permet au président français de maintenir la pression sur le gouvernement congolais. Mais il n’y a aucune garantie que cette stratégie soit la moins mauvaise, même si les autorités congolaises semblent vouloir faire bouger les choses.

Elles ont en effet annoncé fin juillet, après des propos attribués à Joseph Kabila qui aurait confié à ses collaborateurs qu’il ne se sent pas tenu d’obtempérer aux demandes françaises, que la CENI allait être restructurée dans les prochains mois, et que le pasteur Daniel Ngoy Mulunda, son président très contesté, ne devrait pas être reconduit dans ses fonctions. «De toute façon, j’ai la guerre à l’Est», aurait déclaré le jeune Kabila. Dès lors, il apparaît clairement que les Congolais pourraient bien envisager un report du sommet. Une inquiétude que les milieux diplomatiques ne sont pas loin de partager, préférant plutôt parler de «bras de fer» entre Paris et Kinshasa.
Or, ce «bras de fer» n’avait pas lieu d’être. D’abord, comme le souhaitent l’opposition congolaise et certains milieux français nostalgiques de la période où la France dictait sa loi sur le continent, le sommet devrait être reporté, déplacé ou se tenir en l’absence de François Hollande (en sachant que la francophonie est une affaire de la France), ce serait très mal perçu dans toute l’Afrique centrale. Cela équivaudrait à du mépris et encouragerait les dirigeants des pays d’Afrique centrale à se tourner vers d’autres puissances. Une éventualité que Paris, confronté à de nombreux problèmes liés à la compétitivité de ses entreprises, miné par la mauvaise tenue de son commerce extérieur, n’est pas disposé à accepter, malgré le «coup de bluff» de François Hollande. N’en déplaise aux partisans d’une France repliée sur elle-même, les entreprises de l’hexagone peuvent dire merci à l’Afrique où elles réalisent souvent leurs meilleurs chiffres d’affaires.
Ensuite, il est hors de question d’admettre l’ingérence des puissances étrangères dans la politique intérieure des États africains. Une élection présidentielle fût-elle mal organisée et contestée par une partie des candidats demeure une affaire locale et ne saurait donner lieu à d’inadmissibles pressions de l’extérieur. Aucune élection n’étant parfaite, celle de Joseph Kabila ne dérogeant pas à la règle, il revient aux Congolais de régler entre eux leurs contradictions par le dialogue et la concertation. D’ailleurs, d’autres présidents de la République dont les élections étaient aussi contestées et aussi louches que celle de Joseph Kabila, ont été reçus en grande pompe à l’Élysée sans que d’inadmissibles exigences soient posées par les Français. Pourquoi en serait-il autrement pour la République démocratique du Congo, l’un des plus grands pays francophones à travers le monde? Le précédent rwandais, abandonnant le français pour adopter l’anglais comme langue officielle n’a-t-il pas servi de leçon aux disciples du néocolonialisme qui persistent à n’avoir aucun respect pour les institutions africaines?
À l’inverse, les responsables français, eux, semblent avoir mesuré l’importance stratégique de ce sommet de la Francophonie, ce qui nécessiterait la présence de François Hollande. Le 18 juillet, la ministre française de la Francophonie, Mme Yamina Benguigui, s’est dite persuadée, après une visite de quatre jours à Kinshasa, que ce sommet ne sera pas un tribunal. «Le sommet de la Francophonie doit être le sommet de tous les Francophones et en particulier des Congolais», a déclaré la ministre. Une façon de couper court aux rumeurs qui, à l’en croire, mettent à mal la confiance, pourtant essentielle dans les relations entre États. Une chose demeure certaine: ceux qui ont récemment demandé au président français de ne pas se rendre en RDC pour ne pas cautionner le régime de Joseph Kabila, au pouvoir depuis 2001, en soulignant que le déroulement des dernières élections de 2011 et la situation des droits de l’homme, suscitent de nombreuses critiques, devront aussi compter avec les intérêts réciproques des États.

© CongoForum, le samedi 8 septembre 2012

À propos de kakaluigi

Agé de 66 ans, avec 35 ans passés en Afrique dans la République Démocratique du Congo comme missionnaire. Engagé dans l'évangélisation, le social et l'enseignement aux écoles sécondaires. Responsable de la Pastorale de la Jeunesse, Directeur du Bureau Diocésain pour le Développement (BDD), Directeur d'une Radio Communnautaire et membre du Rateco.

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